L’euro: une prime de fragmentation?
Par Vincent Puche
Depuis plusieurs semaines, l’euro s’est déprécié de plus de 20% pour atteindre un niveau historiquement bas, en deçà de la parité avec le dollar américain.
La faiblesse de la devise européenne a plusieurs origines. Tout d’abord, la réserve fédérale américaine mène une politique contractionniste, basée sur une hausse importante des taux d’intérêt, qui a commencé beaucoup plus tôt et qui est plus forte que celle mise en œuvre par la banque centrale européenne. Cette dernière peut apparaitre comme une simple suiveuse des décisions américaines, ce qui réduit d’autant l’attractivité de la devise européenne.
Ensuite, la crise provoquée par la guerre russo-ukrainienne touche principalement les pays européens dont l’approvisionnement, à cause d’un mix énergétique déséquilibré, dépend fortement des importations russes. Le risque de récession suite à l’arrêt des exportations russes est donc plus important en Europe, principalement en Allemagne, affectant ainsi la valeur de l’euro.
Enfin, les tensions budgétaires et politiques dans la zone euro ont réactivé le risque de fragmentation. La banque centrale européenne a reconnu l’éminence de ce risque en mettant en place son programme anti-fragmentation (Transmission Protection Instrument ) fin juillet 2022. Mais son calibrage pose des questions, et l’on peut s’interroger sur sa viabilité en cas de nouvelle crise de la dette.
Il n’y a dès lors aucune raison fondamentale qui incite à une appréciation importante de l’euro dans un futur proche. Reste maintenant à connaitre son niveau d’équilibre à moyen terme. La banque centrale européenne, face à une inflation particulièrement élevée, va-t-elle augmenter fortement ses taux directeurs, ce qui pourrait soutenir l’euro, quitte à générer une forte récession dans la zone euro? Et augmenter le risque de fragmentation…. ?